La Genèse

 

On sait que de tout temps les empires anciens (Chine, Inde, Sumer …) ont eu des échanges commerciaux (route de la soie, par exemple). On a moins souvent remarqué la diffusion culturelles des mythes et des religions, par exemple le "nom" de la divinité : indo-européenne GO(d), GO(tt) ; sémite G(é) O (v’h) … 

Des documents récents trouvés à Kumran (les "manuscrits de la Mer Morte") , ainsi que des écrits babyloniens (tablette d’argile en cunéiforme) éclairent d’une lueur nouvelle le problème de l’unicité des mythes fondateurs, et font apparaître une relation inattendue entre la philosophie taoïste et les mythes de fondation judéo-chrétiens (on pensera aussi à la version grecque : G(aea) et O(uranos) …). En voici une traduction synthétique provisoire.

 


Dieu remet le Go à Adam
Michel-Ange, 1510 

Version primitive d'une fresque de la chapelle Sixtine,
depuis recouverte à la demande du président du Club d'échecs
du Vatican.  (ce document très rare nous a été communiqué par Alain Borrel, président du club de Paris 20)

 

GENÈSE

Au commencement, (??) créa le Goban et les pierres. Mais le Goban était informe et vide et l’esprit de (??) planait au-dessus du Goban. (il) dit : que la lumière soit. Et la lumière fut. (??) vit que l’éclairage était bon, et que la partie pouvait commencer.

Il y eu un coup noir, il y eut un coup blanc ; ce fut le premier échange.

(??) dit : que l’espace qui est en dessus se sépare de celui qui est en dessous. (??) appela "influence" l’espace du dessus et "territoire" celui du dessous ; et il créa la quatrième ligne pour les séparer. (??) vit que cela était bon (surtout le "territoire") ;

Il y eut un coup noir, un coup blanc : deuxième échange.

(??) dit : qu’il y ait des repères pour éclairer le Goban, des routes qui se croisent et des luminaires aux croisées des routes ; et il appela tengen le plus grand luminaire, au centre de l’"influence", et "étoiles" les huit petits luminaires éclairant les bornes du "territoire". (??) vit que cela était bon. (il) fit se croiser les lignes comme les jours (*).

Un coup noir, un coup blanc : troisième échange.

(??) dit : que surgissent des coins et des bords les premières pierres, chacune contenant en germe les développements futurs, chacune prête à être semée à nouveau et reproduite. (??) appela "joseki" les plantes qui venaient d’apparaître, et "fuseki" l’ensemble des plantes crées : (il) les inspecta toutes et vit qu’elles étaient toutes bonnes (quoique chacune adaptée à un terrain particulier). 

Un coup noir, un coup blanc : quatrième échange.

(??) dit : que jaillissent à présent les formes qui bougent : celles qui s’étendent, celles qui volent vers le ciel, celles qui rampent sous la deuxième ligne, celles qui s’enserrent en tentant de s’étouffer mutuellement, celles qui se déploient en évitant le contact, chacune selon son espèce, mais, dit-(il) : toutes auront leur rôle, et au yose, on ne les reconnaîtra plus, et chacune sera jugée selon son mérite et pour l’ensemble de son travail. 

Un coup noir, un coup blanc : cinquième échange.

(??) dit : qu’il y ait une volonté pour guider les pierres, une main pour les semer, des yeux pour les protéger. (il) fit le joueur à son image, il le créa noir et blanc car dit-(il), il n’est pas bon que le joueur soit seul. (il) les appela "partenaires" et fit défiler devant eux toute sa création, afin qu’ils lui donnent des noms. Mais les joueurs ne surent pas nommer tout ce qui avait été créé, et à ce jour, l’œuvre de (??) est encore presque ineffable.

Un coup noir, un coup blanc : sixième échange.

Ainsi furent achevés le Goban, les joueurs, et tout ce qu’ils contiennent. (??) se reposa de sa création pendant le septième échange, et le sanctifia : il interdit que l’on joue un mauvais coup durant le septième échange. Mais les joueurs, oublieux de cette interdiction, ne surent conserver l’harmonie jusqu’au septième échange. Il en résultat de grands malheurs : c’est depuis ce temps que les pierres ont perdu leur immortalité, et doivent gagner leur vie "à la lueur de leur front", c’est-à-dire en formant deux yeux.

(*) Sans doute parce que 19x19=361 : l’année babylonienne était formée de 360 jours (6 x 60) et le tengen ne compte pas …